Les déchets du numérique
Le développement du numérique s’accompagne de la promesse de dématérialiser nos activités et donc de réduire notre impact sur la planète. Pourtant, le numérique et plus généralement le secteur des Technologies de l’Information et de la Communication produit 50% de plus de gaz à effet de serre que le transport aérien et l’on en parle bien moins !
Je vous propose de décrypter ce qui fait l'impact du numérique en 3 parties :
- en amont (1) avec l’exploitation, tout sauf propre, des minerais rares, ces ressources omnoprésentes dans les nouvelles téchnologies,
- à l’usage ( article 2 à lire ICI ) avec un bilan carbone loin d’être virtuel - on parle de 514 kg de gaz à effet de serre par salarié / an du seul fait de son activité numérique, ce qui représente autant qu’un Paris-Moscou en voiture -
- enfin, à la fin de vie ( article 3 à lire ICI ) lorsque le matériel est mis au rebut.
Bonne lecture !
1 L'impact du numérique en amont de l'usage
En amont, nos équipements numériques, comme tous nos objets, nécessitent ressources + eau + énergie afin de passer de l'état de matière à celui de bien de consommation grâce à un processus industriel.
Pour ce qui est du numérique, on a assez peu idée des ressources à ponctionner pour arriver au résultat que nous connaissions : ordinateur, téléphone, GPS, ou même thermomix ...
Un ordinateur, par exemple, est fait de 50% de métaux, plus exactement de dizaines de métaux différents, puis de thermoplastiques (pour résister à la chaleur). Parmi ces métaux certains sont bien connus comme l’aluminium, le cuivre, le fer, l'or, l'argent ou le chrome et d'autres bien moins tels l’antimoine, le baryum, le béryllium, le cadmium etc ... mais tous entrent dans la composition d'un simple ordinateur et on appelle communément ces métaux au noms latins terres rares ou minerais rares. C'est donc de leur extraction que je vais vous parler !
Les minerais rares
Tant l’extraction que le raffinage des minerais rares nécessitent des procédés très polluants.
On appelle minerais rares, 17 métaux passant pour la clef de voute de la transition énergétique. On les trouve, associés à d’autres métaux plus abondants tels le fer ou le cuivre, et mélangés à eux dans l’écorce terrestre dans des proportions souvent infimes. Il faut par exemple raffiner 1200 tonnes de roches pour obtenir 1kg de lutécium !!
Ces minerais rares sont utilisés dans les équipements numériques principalement pour leur propriétés magnétiques exceptionnelles.
Ainsi avec l’évolution des technologies, ils viennent à remplacer des ressources qui rejettent des milliards de tonnes de gaz carbonique (pétrole, gaz, charbon), mais eux ne brûlent pas et ne génèrent pas un gramme de CO2.
Malheureusement, leur extraction et leur purification demande de creuser et broyer la caillasse, puis d’employer une kyrielle de réactifs chimiques tels que les acides sulfuriques et nitriques.
La purification de chaque tonne de terres rares nécessite l’utilisation de 200 mètres cubes d’eau, ensuite le plus souvent rejetés en milieu naturel, chargés de métaux lourds et d’acides.
Un part du problème vient du fait quela plupart des mines se trouvent en Chine. Nombreuses seraient d’ailleurs clandestines, et aucune installation ne respecterait les standards écologiques les plus élémentaires.
La Chine, actuellement premier émetteur de gaz à effet de serre du monde (autour de 30%) est arrivée à contaminer 10% de ses terres par les métaux lourds et à rendre impropre à la consommation 80% des eaux de ses puits.
Cela est à mettre en relation avec le fait que la Chine, productrice de 28 minerais et terres rares essentiels à nos économies, assure plus de 50 % de la production mondiale.
Sur les autres sites d’extraction, la pollution semble êtrela même. C’est le cas du Congo - pays producteur de cobalt, de l’Afrique du Sud, du Kazakhstan ou de l’Argentine …
Pour conclure, selon Green Peace la mine durable n’existe pas, car, non seulement « son objet est par essence de vider le sol mais en plus le recours à des produits chimiques toxiques et à d’immense quantité d’eau pose problème".
En sus des dégats environnementaux, ces processus d’extraction des terres rares ont aussi pour conséquence de raréfier les ressources disponibles pour les populations locales. Ces mines finissent par être à l’origine de problèmes humains et sanitaires très choquants – tels maladies, exodes, etc …
C’est donc près de 50 % de l’impact environnemental du numérique qui se concentre en amont de l’usage, à la fabrication des équipements et même si cela nous semble bien loin, cet impact nous concerne car c’est toujours le coût écologique de l’ensemble du cycle de vie qu’il faut mesurer.
Au vu de tout cela, la sobriété, ou en tout cas, le refus de la sur-consommation, apparaissent comme le meilleur parti, pourtant la hausse de la production d’équipements numériques connectés est de 60% / an.
Sources
ademe
ministère de la transition écologique et solidaire
conception numérique responsable
la guerre des métaux rares, guillaume pitron
la face caché du numérique, collectif
que faire des restes ? collectif
l’économie circulaire, rémy le moigne